À partir du 1er juillet 2021, des obligations en matière de TVA plus rapides s’appliqueront à l’étranger. Votre entreprise est-elle prête ?
par Thomas Hermie, LL.M. Head Indirect Tax, thg
Même si ce n’est pas une priorité pour bon nombre d’entreprises en cette période difficile sur le plan économique, il est temps de s’intéresser de plus près aux nouvelles règles de TVA applicables au commerce électronique, car celles-ci vont changer prochainement. L’objectif de ces nouvelles règles est de réduire la charge administrative et les coûts dans le secteur du commerce électronique, et de créer des conditions de concurrence équitables pour les entreprises de l’UE et hors UE. Souvent, les vendeurs hors UE ne facturent pas de TVA européenne sur leurs ventes dans l’UE. Ces nouvelles règles prévoient principalement que pour les ventes à distance, le vendeur devra (presque) toujours appliquer la TVA de l’État membre de l’acheteur. En principe, c’est également le cas lorsque la marchandise provient d’un pays tiers et qu’elle a été préalablement importée.
Initialement prévue le 1er janvier 2021, l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles a été reportée au 1er juillet 2021 en raison de la crise du coronavirus. La Belgique a déjà transposé dans son droit national les règles établies par l’Europe. Bien que l’on puisse douter que tous les États membres de l’UE soient prêts à temps, il convient de se préparer à appliquer correctement les dispositions suivantes dès le 1er juillet 2021 :
Suppression des seuils existants pour les ventes à distance intracommunautaires à des particuliers et introduction d’une mesure de simplification pour ce type de vente
Les « ventes à distance » désignent des ventes d’objets à des particuliers lorsque les objets sont expédiés par ou pour le compte du vendeur depuis un État autre que l’État membre de l’UE dans lequel le transport est destiné à l’acquéreur.
Selon le règlement actuel de vente par correspondance, le vendeur peut continuer à appliquer la TVA de son pays de résidence sur ces ventes à distance transfrontalières et intracommunautaires tant que son chiffre d’affaires dans l’État membre de l’acheteur ne dépasse pas un certain seuil (par exemple, 35 000 euros en Belgique).
Ces seuils sont désormais supprimés. Si le chiffre d’affaires intracommunautaire du vendeur sur les ventes à distance (et sur les services de télécommunication, radiodiffusion et électroniques) dépasse le seuil annuel de 10 000 euros, il devra immédiatement facturer la TVA de l’État membre du client B2C. Toutefois, le vendeur peut désormais honorer l’ensemble de ses obligations de conformité via le portail OSS (« one-stop shop » ou « guichet unique »). Un numéro d’identification TVA distinct n’est plus nécessaire dans chaque État membre, sauf dans ceux où le vendeur a un siège ou un entrepôt. Les vendeurs qui ne sont pas établis dans l’UE peuvent également utiliser cette procédure. Dès qu’une entreprise décide d’appliquer l’OSS, toutes les ventes réalisées dans les États membres où elle ne dispose pas d’un entrepôt doivent être effectuées via l’OSS. L’application de la procédure OSS n’est toutefois pas obligatoire. On peut encore décider de continuer à effectuer l’ensemble des transactions via les numéros d’identification et les déclarations de TVA locaux.
Introduction des mesures de simplification pour les ventes à distance depuis des pays tiers
Outre l’adaptation des règles relatives aux ventes à distance intracommunautaires, une nouvelle réglementation est prévue pour la vente à distance de marchandises depuis des pays tiers qui doivent être importées avant la livraison aux clients B2C dans l’UE.
Actuellement, c’est la procédure normale d’importation qui s’applique : (i) soit le vendeur importe en son nom propre et procède ensuite à une vente à distance intracommunautaire, ce qui nécessite des numéros d’identification locaux à la TVA et le respect des obligations de conformité pour payer la TVA à l’importation et la TVA dans l’État membre de l’UE du client, (ii) soit le vendeur ignore cette possibilité et le transporteur récupère la TVA à l’importation (et les droits de douane) auprès du client privé.
À partir du 1er juillet 2021, les importations et les ventes subséquentes aux clients B2C d’envois d’une valeur maximale de 150 euros pourront être effectuées via deux régimes simplifiés de TVA :
- Via le règlement sur le guichet unique à l’importation IOSS (« Import One Stop Shop ») : celui-ci prévoit de déclarer et payer, via le portail de l’IOSS, la TVA qui est due sur les ventes à distance depuis des pays tiers dans l’État membre de l’UE où les commandes sont livrées. L’importation de ces marchandises est exonérée de la TVA et les procédures douanières sont simplifiées. Le numéro d’identification à la TVA du vendeur à l’IOSS doit toutefois être communiqué aux autorités douanières. Le vendeur doit donc s’être préalablement inscrit auprès de l’IOSS.
- Via le règlement spécial non-IOSS pour la déclaration et le paiement de la TVA à l’importation : cette deuxième simplification peut également s’appliquer à la mise en libre pratique des marchandises dans l’État membre de l’UE où elles sont livrées au consommateur final. Cette simplification prévoit que les opérateurs postaux, les transporteurs ou d’autres agents douaniers effectuent les formalités d’importation et paient la TVA au nom de l’acheteur. Ainsi, le vendeur peut éviter une inscription locale au registre de la TVA.
- Bien entendu, dans les cas mentionnés ci-dessus, la procédure standard de perception de la TVA lors de l’importation peut toujours être utilisée. Cette procédure reste également obligatoire lorsque les conditions d’application des règlements spéciaux d’importation susmentionnés ne sont pas remplies (par exemple, lorsque la valeur réelle des marchandises importées dépasse 150 euros).
Suppression de l’exonération de la TVA pour l’importation des envois ne dépassant pas 22 euros
Outre l’introduction des procédures simplifiées d’importation pour les envois de marchandises d’une valeur réelle inférieure ou égale à 150 euros, comme expliqué ci-dessus, l’exonération de la TVA pour les envois jusqu’à 22 euros sera également supprimée. Cela devrait empêcher les entreprises non européennes de continuer à livrer dans l’UE en exonération de la TVA et de bénéficier d’un avantage commercial indéniable par rapport à leurs concurrents établis dans l’UE.
Nouvelles obligations fiscales pour les interfaces électroniques telles que les boutiques en ligne, les places de marché et les plateformes
Pour les places de marché électroniques et les vendeurs qui y font du commerce, certaines dispositions vont également changer, du moins si dans le cadre de ces ventes en ligne
- des envois d’une valeur réelle inférieure ou égale à 150 euros sont importés dans l’UE (que le vendeur sous-jacent soit établi dans l’UE ou hors UE), ou
- le vendeur sous-jacent n’est pas établi dans l’UE (dans ce cas, peu importe si les marchandises proviennent d’un entrepôt à l’intérieur ou à l’extérieur de l’UE et peu importe leur valeur).
Dans les deux cas, on part du principe fictif que les opérateurs d’une interface électronique (place de marché ou plateforme) ont reçu les marchandises du vendeur avant de les vendre au client. Cela s’applique aussi bien aux interfaces électroniques établies dans l’UE qu’à l’étranger. Les « vendeurs fictifs » doivent prélever cette TVA sur ces ventes et la reverser dans le pays du consommateur final. Pour ce faire, les interfaces électroniques peuvent également utiliser la procédure OSS et IOSS.
Extension aux services du régime MOSS existant
Un « mini OSS » (MOSS) existe déjà depuis 2015 pour déclarer et payer la TVA sur les services de télécommunication, radiodiffusion, télévision et autres services électroniques (c’est-à-dire des services largement automatisés, sans ou avec peu d’intervention humaine) aux clients B2C de l’UE. Grâce à l’élargissement du champ d’application du MOSS à un OSS (qui n’est plus mini), à partir du 1er juillet 2021, la TVA pourra également être déclarée et payée pour d’autres services B2C qui, en vertu des règles spéciales de localisation, sont soumis à la TVA dans l’État membre de l’UE où le client B2C est établi (par exemple, location de moyens de transport, services dans l’immobilier et l’événementiel, etc.).
Depuis le 1er avril 2021, la plupart des États membres permettent déjà une préinscription à l’(I)OSS si l’on souhaite utiliser ces règles. Veuillez noter que les nouvelles « mesures de simplification » peuvent également créer des exigences comptables et des complexités supplémentaires. Ainsi, dans de nombreux cas, le système ERP doit être adapté afin de tenir compte immédiatement des lieux de livraison et taux de TVA locaux corrects ainsi que des différentes devises.
Les entreprises qui utilisent l’OSS pour déclarer leurs ventes à distance ou leurs services (électroniques) ne doivent plus prendre en considération les règles de facturation applicables dans l’État membre du client. Elles devront désormais respecter les règles de l’État membre en matière d’identification OSS.
Conclusion
La question de savoir si toutes ces mesures apporteront réellement les simplifications escomptées ne pourra être évaluée que lorsque l’ensemble des dispositions seront entrées en vigueur et que les premières entreprises utiliseront ces nouvelles procédures. La difficulté pour les entreprises sera souvent de décider ce qui doit figurer dans la déclaration périodique de TVA et ce qui doit être inclus dans la déclaration (I)OSS, surtout si ces entreprises, en tant que vendeurs en ligne, détiennent des stocks dans différents pays (par exemple auprès de partenaires logistiques). Reste aussi à savoir si tous les États membres de l’UE seront prêts à temps.
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